L’article L. 326-1. du Code du travail prévoit que : « Toute personne briguant un poste de travail est soumise en vue de l’embauchage à un examen médical fait par le médecin du travail. Pour les salariés de nuit visés à l’article L. 326-3. point 4. et pour les postes à risques dont question à l’article L. 326-4. ci-après l’examen doit être fait avant l’embauchage. Pour les autres postes l’examen doit être fait dans les deux mois de l’embauchage (…). »
Dans l’affaire 1 en cause, un salarié s’est vu notifier une décision de refus de reclassement professionnel de la part de la Commission mixte au motif qu’il occupait son dernier poste de travail depuis moins de 3 années et qu’il n’était pas en possession d’un certificat d’aptitude au poste de travail établi par le médecin du travail compétent lors de l’embauche. Cette décision a été suivie d’une cessation de plein droit de son contrat de travail en raison de l’épuisement des droits du salarié à l’indemnité pécuniaire de maladie et ce, conformément à l’article L. 125-4. point 2. du Code du travail.
Le salarié s’est pourvu en justice pour réclamer la condamnation de son ancien employeur au paiement de dommages et intérêts, d’une part, pour la perte de rémunération depuis la cessation de son contrat de travail et, d’autre part, pour avoir été privé de la chance de bénéficier d’un reclassement interne ou externe et ce, alors que l’employeur a omis de lui faire passer un examen médical d’embauche.
Il appartenait donc aux juges de se prononcer sur qui, de l’employeur ou du salarié, pèse l’obligation de réaliser un examen médical d’embauche et si cette obligation constitue une obligation de résultat ou une obligation de moyens.
Sur ce point, la Cour d’appel a d’abord rappelé que l’examen médical d’embauche a pour but de pourvoir à la protection de la santé et à la sécurité des travailleurs de l’entreprise. Elle a en outre précisé que : « L’article L. 326-1. du Code du travail employant la conjugaison du verbe « soumettre » dans sa forme passive et l’article L. 327-2. du Code du travail sanctionnant l’employeur en cas de défaut d’un examen médical d’embauche, c’est à juste titre que le tribunal du travail a retenu qu’il résulte de la lecture combinée de ces articles du Code du travail précités, que, contrairement à l’argumentation de la société, le Code du travail prévoit à la charge de l’employeur une obligation d’organiser pour chaque salarié un examen médical d’embauche. »
Pour enfin arriver à la conclusion que : « L’employeur doit assurer la sécurité et la santé de l’ensemble des salariés. Cette obligation pesant sur l’employeur est une obligation de résultat. » La Cour d’appel s’est encore appuyée sur un autre arrêt du 21 juin 2011 dans lequel il a été précisé que : « L’obligation qui pèse sur l’employeur en matière de protection de la santé et de la sécurité des travailleurs dans l’entreprise constitue une obligation de résultat ; admettre qu’il ne s’agirait que d’une obligation de moyens à charge de l’employeur aboutirait à vider cette obligation de tout sens et de tout effet ».
En l’espèce, l’employeur a voulu s’exonérer de sa responsabilité par la faute d’un tiers, en l’occurrence, le service de santé au travail compétent, qui serait débordé et qui ne lui aurait pas alloué un nombre suffisant de créneaux de visites médicales pour soumettre en temps utile chacune de ses nouvelles recrues à un examen médical d’embauche. Or, il ne ressortait aucunement des pièces versées en cause que l’employeur a soumis au service de santé une demande de rendez-vous pour un examen médical d’embauche pour le salarié concerné, de sorte que la Cour d’appel a décidé que : « En l’absence de démarches de l’employeur, ce dernier est malvenu pour reprocher à l’État, respectivement au (service de santé compétent), de ne pas lui avoir accordé un nombre suffisant de créneaux en vue de soumettre ses salariés à un examen médical d’embauche. »
L’affaire n’a pas engendré d’autres conséquences pour l’employeur qui malgré sa faute n’a pas eu à payer de dommages et intérêts au salarié qui n’a pas été en mesure de prouver un préjudice certain. En effet, la Cour d’appel a estimé que le salarié est resté en défaut d’établir que s’il avait bénéficié d’un examen médical d’embauche, il aurait nécessairement pu profiter d’un reclassement interne ou externe, étant donné qu’il ne résulte d’aucun élément du dossier qu’après examen de son dossier, la Commission mixte aurait prononcé un tel reclassement interne ou externe, une telle décision dépendant non pas de l’accomplissement des critères d’éligibilité, mais de la situation globale du concerné. La Cour d’appel a également retenu qu’il n’est également pas établi sur base des éléments invoqués par le salarié qu’il aurait eu une chance réelle et sérieuse de bénéficier d’une décision de reclassement si l’employeur lui avait fait faire passer l’examen médical légalement prévu lors de son embauche.
Cet arrêt suscite un grand intérêt dans la mesure où les juridictions du travail sont catégoriques sur l’obligation de résultat à la charge de l’employeur en matière d’examen médical d’embauche. Il est dès lors très important de rappeler que pour chaque salarié pris individuellement, l’employeur doit faire une demande de rendez-vous pour l’examen médical d’embauche auprès du service de santé compétent et se ménager la preuve d’une telle demande afin de pouvoir, le cas échéant, s’exonérer de sa responsabilité.